Résumé : | Les années passent, et avec elles, se posent toujours les mêmes questions en matière de lutte
contre le terrorisme. Si la société civile a maintes fois appelé le gouvernement à revoir sa stratégie
dans cette lutte et a à plusieurs reprises tiré la sonnette d’alarme pour une meilleure prise en
compte des droits fondamentaux dans cet objectif, il semble que la quête sécuritaire, rapide et
souvent peu transparente, ait pris le dessus sur la protection des droits fondamentaux. La mise en
balance des deux paraît bancale.
Les années passent, et avec elles, un durcissement croissant des lois dans une optique sécuritaire.
Des ailes spécifiques ont été créées dans les prisons, se targuant de pouvoir mieux contenir le
processus de radicalisation, ou en tout cas, de pouvoir en limiter sa propagation. Le droit des
étrangers est lui aussi en proie à des modifications, entraînant par celles-ci un risque de création
de belges de « seconde zone », simplement en raison du mode par lequel une personne en acquiert
la nationalité, facteur qui, plus que les liens d’attache réels avec la Belgique, semble être
prépondérant dans la détermination de l’identité « belge ». Les victimes d’actes terroristes sont
également placées dans une tourmente tant le système actuel de réparation et d’indemnisation
est contraignant et leur impose de revivre leur trauma encore et encore. Quant à l’arsenal pénal,
celui-ci a non seulement été élargi, mais il consacre en outre des incriminations toujours aussi
floues.
Ces procédés contribuent-ils vraiment à instaurer la paix sociale ? Ne risquent-t-ils pas
d’engendrer un effet boomerang provoqué par une stigmatisation croissante de certaines
catégories de personnes en lieu et place d’analyser les causes du problème afin de comprendre les
raisons sous-jacentes au phénomène terroriste et d’y apporter les réponses adéquates ? Quelles
sont les démarches entreprises en vue d’une meilleure compréhension de l’extrémisme violent ?
La réponse au phénomène terroriste est-elle nécessairement répressive ?
C’est pourquoi il est important d’insister sur le rôle essentiel joué par les droits humains et les
libertés fondamentales. Loin d’être des corollaires de l’impunité, elles établissent un cadre propice
à une réaction adéquate, juste et efficace au phénomène terroriste en ce que ces droits et libertés
posent les balises d’une vie en société harmonieuse et respectueuse aussi bien des individus que
de la collectivité. De cette façon, les droits humains invitent à se poser les bonnes questions, qui
dérangent parfois, mais qui sont tout à fait nécessaires à une appréhension objective de
phénomènes telle que la radicalisation et la lutte contre le terrorisme, en prenant en compte tous
les enjeux qu’ils posent. Les droits fondamentaux renforcent par ce fait la légitimé des actions en
ce qu’ils poussent à être pointu dans les terminologies et définitions utilisées, et veillent à ce
qu’une mise balance de tous les intérêts en présence soient correctement réalisée. Ils sont le
prisme au travers duquel la lutte contre le terrorisme doit s’inscrire car ils permettent de garder
le contrôle sur ce qui est acceptable pour une société démocratique et basée sur l’état de droit.
Avec ce nouveau rapport du Comité T, force est toutefois de constater que le respect des droits
humains dans le cadre de la lutte contre le terrorisme est pourtant toujours un chantier en cours. |